Les pièges de la semaine de quatre jours payés cinq

La semaine de quatre jours, sans réduction de salaire, semble être dans l’ère du temps. L’idée séduit toujours plus à l’étranger où plusieurs projets pilotes se sont révélés concluants. En réalité, ce modèle de travail est un miroir aux alouettes: une idée séduisante sur le papier, mais susceptible d’entraîner de fâcheuses conséquences dans son application.

Travailler quatre jours au lieu de cinq, pour le même salaire, implique ipso facto une réduction de la productivité des entreprises de 20 pour cent. Combler une telle perte de compétitivité s’apparente à une équation insoluble pour de nombreuses entreprises, a fortiori en ces temps de turbulences. Rien n’interdit une entreprise à franchir le pas, mais en faire une généralité serait hautement problématique.

Mais comment accomplir la même quantité de travail en quatre jours? Qu’il s’agisse de la planification des présences, de la rotation du personnel et du calendrier des vacances, le mode de fonctionnement des entreprises doit être repensé en profondeur. Si les plus grandes d’entre elles ont les ressources pour amortir ce changement, il en va autrement pour les PME.

Moins de temps pour effectuer les mêmes tâches: la semaine de quatre jours entraîne inéluctablement une intensification du travail. Le nombre d’heures supplémentaires vont inévitablement augmenter. Cette pression accrue risque d’avoir un impact sur la santé psychologique des employés.

Les salariés ne veulent pas forcément moins travailler, mais mieux.

Lentement mais sûrement, la durée de travail diminue en Suisse. Selon l’Office fédéral de la statistique, la semaine de travail à plein temps est passée de 43,2 heures en 1991 à 41,1 heures en 2019. Or, comme le montrent plusieurs enquêtes, les salariés ne veulent pas forcément moins travailler, mais mieux. Pour répondre à ces attentes, les employeurs sont appelés à favoriser l’autonomie et la responsabilité de leurs collaborateurs, notamment grâce à des horaires plus souples.

Fin 2022, plus de 120’000 postes étaient vacants en Suisse. Une réduction du temps de travail de 20 pour cent dans les entreprises aggraverait le problème. Pour lutter contre la pénurie de main-d’œuvre, il faut augmenter le volume de travail et non envisager de le réduire encore.

La clé réside dans l’accès au marché des quelque 350’000 personnes occupées à temps partiel et souhaitant travailler davantage. Il s’agit en majorité de femmes, puisque 60 pour cent d’entre elles occupent un emploi à temps partiel. Dans ce contexte, améliorer la conciliation famille-travail devient une priorité absolue.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agéfi».