Marché du travail: heureux salariés suisses

28 mai 2018 Revue de presse

Les salariés suisses gagnent bien leur vie. L’Enquête suisse sur la structure des salaires 2016 menée par l’Office fédéral de la statistique (OFS) le confirme: un Suisse sur deux touche plus de 6500 francs par mois. Autre bonne nouvelle: depuis 2014 le salaire médian des Helvètes a augmenté de 1,2 pour cent.

Cette progression est remarquable si l’on songe à la croissance économique plutôt faible et au taux d’inflation négatif observés dans le pays au cours des deux dernières années. Elle corrobore les résultats des enquêtes menées par l’Observatoire sur la libre circulation des personnes entre la Suisse et l’Union européenne qui montrent que, contrairement aux craintes souvent émises, l’évolution des salaires n’a pas subi d’influence négative du fait de l’immigration. Elle contredit aussi l’affirmation selon laquelle les entreprises suisses recrutent à l’étranger des travailleurs «bon marché» pour maintenir leurs charges salariales à bas niveau.

Et les bonnes nouvelles ne s’arrêtent pas là: de 2008 à 2016, la proportion de bas salaires – correspondant à des emplois payés moins de 4335 francs bruts – est passée de 11,4 à 10,2 pour cent. Pendant la même période, l’écart entre les hauts salaires et les bas salaires a diminué: la progression des salaires des employés à faible revenu (9,9 pour cent) a largement dépassé celle des employés les mieux payés (6,3 pour cent).

Les salariées ont aussi de quoi se réjouir. Entre 2014 et 2016, les disparités salariales entre hommes et femmes se sont resserrées, passant de 12,5 à 12 pour cent. Comme le relève l’OFS, ce différentiel s’explique par l’insertion professionnelle différente (niveau de responsabilité du poste occupé, branche économique) du personnel féminin et masculin sur le marché du travail.

Si la réduction de cet écart semble indiquer que les femmes sont de mieux en mieux intégrées dans le marché du travail, les difficultés pour les mères actives concilier carrière et famille demeurent. Plutôt que d’obliger les entreprises à effectuer des analyses de salaire, comme le propose le Conseil fédéral, et plutôt que d’établir une liste noire des entreprises se refusant à tout contrôle des salaires, comme le prône Travail.Suisse, il faut redoubler d’efforts pour favoriser la comptabilité entre vie familiale et professionnelle.

Une des causes majeures des différences salariales persistantes est à chercher dans les interruptions des femmes pendant les années où elles élèvent leurs enfants. Le déficit d’expérience professionnelle lié à ces périodes d’absence explique souvent le retard dont souffrent leurs carrières par rapport à celles de leurs collègues masculins. Cela se répercute aussi sur le niveau des rémunérations. Pour que l’écart salarial se réduise encore à l’avenir, la priorité doit être donnée au développement de l’offre de prise en charge extrafamiliale, Une telle mesure permettrait de réduire sensiblement ces interruptions tout en incitant les mères de réintégrer plus rapidement le marché du travail.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agefi».