Hausse de salaires: les syndicats déconnectés de la réalité

5 pour cent. C’est la hausse de salaire réclamée par plusieurs centrales syndicales pour 2023. Cette demande forte se justifierait non seulement par l’envol de l’inflation et le besoin de rattrapage pour nombre de travailleurs touchés de plein fouet par la pandémie, mais aussi par la hausse massive attendue des primes d’assurance maladie.

Il faut être deux pour danser le tango. Or, les revendications syndicales se heurtent à une fin de non-recevoir de la part des employeurs car considérées comme excessives, éloignées des réalités économiques et faisant fi du rôle des négociations dans la fixation des salaires.

Les syndicats ont également tort d’exiger une augmentation des rémunérations afin de compenser la hausse des primes des caisses-maladie, qui est une dépense étrangère à l’activité des entreprises.

Le niveau des rémunérations ne se décrète pas. Il se négocie de manière décentralisée – au sein des entreprises ou dans le cadre de conventions collectives de travail (CCT) – en fonction d’une multitude de paramètres, tels la productivité, la santé financière et les résultats de chaque branche et entreprise.

Dans le contexte incertain actuel, la marge de manœuvre des employeurs pour des augmentations de salaires se voit réduite.

Si, à la lumière de ces éléments, les perspectives s’annoncent favorables, des hausses de salaire doivent être prévues de manière à faire participer les collaborateurs aux résultats de leur entreprise.

Or la conjoncture économique actuelle est loin d’être favorable aux employeurs. Le conflit en Ukraine, les tensions sur le chaines d’approvisionnement, la crise énergétique sont autant d’aléas qui mettent à dure épreuve les entreprises, déjà fragilisées par deux ans de pandémie.

Dans ce contexte incertain, les exigences des syndicats paraissent excessives. La pression à la baisse des coûts et aux gains de productivité demeure élevée, la marge de manœuvre des employeurs pour des augmentations de salaires se voit réduite.

Et l’inflation? Bien que modérée par rapport à l’UE et aux États-Unis, la flambée des prix est certes un paramètre qui doit figurer sur la table des négociations salariales, mais force est de constater que l’actuelle poussée de l’inflation, presque exclusivement importée, réduit d’autant plus les marges des entreprises.

En Suisse, faut-il le rappeler, il n’y a pas de compensation intégrale du renchérissement pour les salaires, ni vers le haut ni vers le bas. Les CCT, qui couvrent près de 50 pour cent des salariés, tiennent compte de l’indice des prix à la consommation jusqu’à un certain seuil (généralement fixé à 1,5 pour cent). Passée cette limite, des hausses supplémentaires doivent faire l‘objet d’accords spécifiques. Dit autrement, même en période d’inflation galopante, pas de hausse des salaires sans négociations paritaires.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agéfi».