La stratégie patronale contre la pénurie de personnel

La pénurie de main-d’œuvre a atteint un niveau record en Suisse. Les chiffres, maintes fois rappelés, soulignent la gravité de la situation: quelque 120’000 postes seraient actuellement  vacants et, le déclin démographique aidant, un demi-million de travailleurs pourraient manquer d’ici 2030.

Face à un tel scénario, il est urgent d’agir. L’Union patronale suisse (UPS) a décidé de prendre le problème à bras-le-corps, en publiant un «Plan de mesures contre la pénurie de personnel qualifié». Dans un contexte caractérisé par un taux de chômage historiquement bas, la stratégie fait la part belle à l’augmentation du temps de travail. L’objectif affiché est de pourvoir des dizaines de milliers de postes avec du personnel qualifié autochtone.

La durée du travail ne cesse de baisser en Suisse. La population active travaille presque 14 jours de moins par an qu’il y a encore dix ans. L’essor du temps partiel, lequel est passé de 29 pour cent des actifs en 2000 à 37 pour cent en 2022, et l’augmentation du nombre de jours de congés expliquent en grande partie ce recul.

Pour contrecarrer le manque de personnel qualifié, l’UPS préconise de revenir à des temps de travail plus long en s’attaquant au sous-emploi. La Suisse est championne en la matière:  Elle compte en effet 350’000 actifs à temps partiel (majoritairement des femmes) souhaitant travailler davantage.

La population active travaille presque 14 jours de moins par an qu’il y a encore dix ans.

La priorité doit être donnée à l’aménagement de conditions cadre incitant cette catégorie d’actifs à augmenter leur temps d’occupation. Cela passe par un meilleur soutien financier aux crèches et, sur le plan fiscal, par l’introduction de l’imposition individuelle, susceptible de pourvoir jusqu’à 60’000 postes à temps plein supplémentaires.

Malgré l’adoption de AVS 21, la Suisse est l’un des pays d’Europe où l’âge du départ à la retraite est le plus bas, bien que l’espérance de vie y soit plus élevée. En moyenne, les Suisses quittent le marché du travail à l’âge de 65 ans. Cette situation s’explique en partie par une réglementation trop rigide. Mais les entreprises ont aussi leur part de responsabilité: seule une minorité d’entre elles mènent une politique active à l’égard des employés les plus âgés.

Si l’entreprise et le collaborateur y trouvent leur compte, le maintien en emploi après 65 doit être favorisé. Les nouveaux modèles de travail, telles les carrières en arc, avec une diminution du taux d’occupation, peuvent aider les travailleurs d’un certain âge à rester plus longtemps sur le marché du travail et par là même à répondre aux besoins en personnel des entreprises.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agéfi».