Réforme de l’AVS: atermoiement irresponsable

28 octobre 2020 Revue de presse

Notre système de retraite est-il encore réformable? La question n’a rien d’incongru. Depuis plus de vingt ans, toutes les tentatives visant à adapter les institutions de l’AVS et de la LPP aux défis démographiques ont échoué. Le dernier exemple en date est le rejet de la réforme Prévoyance vieillesse 2020 en septembre 2017. Une inertie qui met en péril l’avenir de nos retraites.

La situation est particulièrement grave pour l’AVS. Depuis 2014, notre principale assurance sociale est plongée dans les chiffres rouges. Les deux milliards de francs injectés chaque année dans le fonds AVS, suite à l’acceptation de la Réforme fiscale et financement de l’AVS (RFFA), ne suffiront pas pour éponger une dette qui pourrait atteindre 26 milliards de francs d’ici 2030. Des mesures s’imposent d’urgence pour enrayer cette évolution alarmante.

La Prévoyance vieillesse 2020, qui ambitionnait de moderniser conjointement les 1er et 2e piliers, a été refusée en votation populaire. Le message des urnes est clair: l’AVS et la prévoyance professionnelle doivent être réformées séparément.  Cet appel a été entendu par le Conseil fédéral qui, en juin 2018, a mis en consultation la réforme AVS 21. Cette dernière vise à assurer un financement suffisant de l’AVS jusqu’à l’horizon 2030.

En août 2019, le Conseil fédéral a publié son Message relatif à AVS 21. Conscient du caractère urgent de la réforme, le gouvernement préconise sa rapide mise en œuvre, Espoir déçu. Force est en effet de constater qu’entre atermoiements et tergiversations, le projet avance au ralenti.

La RFFA est certes passée par là, mais le Parlement ne met aucun empressement à faire avancer la réforme AVS 21. Ce n’est qu’en août 2020 que la commission ad hoc du Conseil des États a entamé ses délibérations. Contrairement à ce qui avait été prévu initialement, le projet n’a pas pu être soumis au plénum lors de la session d’automne. Reste à espérer qu’il soit enfin prêt pour les débats de la session d’hiver.

Un train de sénateur qui donne un mauvais signal politique. Le Parlement passe à côté de l’objectif de la révision: mettre en œuvre les mesures de stabilisation financière avant la grande vague de départs à la retraite de la génération «babyboom». Plus tard seront prises les mesures de garantie de financement de l’AVS, plus grandes seront les lacunes à combler. Faute de mesures structurelles prises rapidement, le risque est grand de devoir procéder à des injections financières pures.

Pour les employeurs, cette manière de faire est irresponsable. D’une part, parce que des charges non financées toujours plus lourdes pèseront sur les générations suivantes et, d’autre part, parce que, comme le montrent plusieurs enquêtes, la confiance dans la prévoyance vieillesse s’érode. Une note d’espoir toutefois: les partis politiques bourgeois ont réservé un accueil favorable aux propositions du patronat – relèvement de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans et hausse de la TVA de 0,3 pour cent – pour assurer la pérennité de l’AVS.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agéfi».