Le Conseil fédéral rejette l’initiative irréaliste «AVSplus», mais il doit aussi alléger sa réforme de la prévoyance vieillesse

14 mai 2014 Nouvelles

L’initiative «AVSplus» est totalement déplacée: malgré le vieillissement démographique et les milliards de francs de déficit auxquels il faut s’attendre, les syndicats exigent une augmentation supplémentaire massive des rentes. Le Conseil fédéral rejette ce texte à très juste titre. De son côté, il lui appartient de faire également un pas dans la bonne direction en allégeant son projet de réforme de la prévoyance vieillesse. Un projet beaucoup trop massif dont l’Union patronale suisse demande qu’il soit fractionné et traité selon un ordre de priorités, car c’est le seul moyen de garantir que les rentes de demain demeurent au même niveau qu’aujourd’hui.

En réclamant une hausse massive des prestations de l’AVS, les auteurs de l’initiative «AVSplus» ignorent grossièrement la réalité du vieillissement démographique et semblent n’accorder aucune importance à la question de savoir si les rentes actuelles pourront encore être financées à l’avenir. Il est pourtant évident qu’aujourd’hui même, un nombre toujours plus réduit de personnes actives doivent financer des rentiers de plus en plus nombreux, ce qui risque à terme de ruiner le système de l’AVS. Un premier indice préoccupant à cet égard est le résultat de répartition de l’AVS: la différence entre les recettes encaissées et les rentes versées est tombée à 14 millions de francs seulement en 2013, alors qu’elle atteignait encore 260 millions en 2012. Si cette tendance se maintient, le déficit annuel de l’AVS pourrait avoisiner les 9 milliards en 2030.

Les syndicats ne tiennent pas compte de ces perspectives. Au lieu de se soucier sérieusement de l’avenir de l’AVS et de la prévoyance vieillesse, ils exigent une majoration générale de 10 pour cent des prestations de l’AVS. Ainsi notre principale assurance sociale devrait-elle non seulement combler un prévisible trou financier à hauteur de plusieurs milliards, mais encore assurer jusqu’à 6 milliards de francs de dépenses supplémentaires par année. La tâche qui consiste à garantir le niveau actuel des rentes est à elle seule herculéenne. Face à l’évolution démographique, exiger en outre un accroissement des rentes est tout simplement irresponsable. Les expériences hasardeuses du type «AVSplus» laissent l’Union patronale suisse totalement perplexe. Contrairement aux syndicats, elle prend le problème de l’évolution démographique au sérieux et propose des solutions permettant de maintenir à l’avenir le niveau actuel des rentes.

Le Conseil fédéral doit remanier sa réforme mammouth
Le Gouvernement propose très justement de refuser l’initiative «AVSplus» sans lui opposer de contre-projet. Il écarte ainsi les exigences irréalistes des syndicats et met le viseur sur une AVS solide pour demain. Mais il doit aussi faire un pas dans la bonne direction en remaniant son propre projet de réforme, conformément aux multiples exigences qui se sont exprimées lors de la procédure de consultation. Dans sa prise de position sur la réforme de la prévoyance vieillesse (en allemand) l’Union patronale suisse a proposé une solution permettant de préserver le niveau des rentes du premier et du deuxième pilier.

Le Conseil fédéral doit reprendre son projet surchargé pour le diviser en portions digestes et échelonner les réformes selon des étapes prioritaires. A cette fin, les mesures les plus urgentes sont le relèvement de l’âge de référence de la retraite à 65 ans pour les femmes comme les hommes ou l’abaissement à 6,0 pour cent du taux de conversion minimum. Si le Gouvernement ne le fragmente pas, son plan réformes compact lourdement axé sur les recettes et peu susceptible de trouver des majorités court le risque d’échouer soit au stade des délibérations parlementaires, soit au plus tard devant le peuple. Or, le naufrage de cette réforme serait funeste au regard des défis démographiques qu’il s’agit de surmonter.

Alors que les syndicats ont perdu tout sens de la mesure avec leur initiative «AVSplus», l’Union patronale suisse explore au contraire des voies constructives dans le souci de préserver les niveaux actuels de rentes. Pour tout assuré, avoir un plan de retraite financièrement assuré est un besoin fondamental. Grâce à la politique de prévoyance prudente et clairvoyante qui a été suivie ces dernières décennies, ce besoin peut être aujourd’hui satisfait. Pas plus que les expériences syndicales aventureuses, les programmes de réformes voués à l’échec ne doivent mettre cet acquis en péril.