Financement des crèches: garder le sens de la mesure

19 octobre 2023 Revue de presse Opinions

Trop chères, trop rares, trop pleines, la Suisse a mal à ses crèches. Ce constat est partagé par l’Unicef qui, dans un rapport publié en 2021, classait notre pays au 38e rang sur 41 en ce qui concerne l’accessibilité, la qualité et le caractère abordable des offres d’accueil extrafamilial des enfants d’âge préscolaire.

Un bilan peu reluisant qui explique en grande partie pourquoi de nombreux parents renoncent à placer leurs enfants à la crèche. Selon l’Office fédéral de la statistique, 15 pour cent des mères, dont l’écrasante majorité ont un taux d’occupation réduit, travailleraient davantage si elles pouvaient recourir à des solutions de garde institutionnelle à un coût abordable.

Pour répondre à cette demande, un soutien financier accru aux crèches s’impose, a fortiori dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre. Mais comment faire concrètement? Trois propositions sont inscrites à l’agenda politique, mais aucune ne semble véritablement satisfaisante.

Lancée en mars 2022 par un comité interpartis emmené par le Parti socialiste, l’initiative populaire sur les crèches prévoit que chaque enfant dès l’âge de trois mois, et jusqu’à la fin de l’enseignement de base, puisse bénéficier d’un accueil extrafamilial institutionnel. Le projet, séduisant de prime abord, se heurte à un coût prohibitif. Le Conseil fédéral l’a bien compris. Il s’oppose à cette initiative car, à l’en croire, elle «grèverait lourdement les finances de la Confédération par des coûts supplémentaires se chiffrant en milliards».

Doit-on rappeler que les allocations pour enfants financées par les employeurs se sont élevées à près de 5 milliards de francs en 2021?

La Commission de la science, de l’éducation et de la culture du Conseil des États souhaite introduire un élément supplémentaire dans le système des allocations familiales sous la forme d’une allocation de garde d’enfant. Seuls les parents ayant un certain taux d’activité y auraient droit. Cette solution doit être catégoriquement rejetée car elle mettrait encore plus fortement les employeurs à contribution. Doit-on rappeler que les allocations pour enfants financées par les employeurs se sont élevées à près de 5 milliards de francs en 2021.

La troisième proposition émane du Conseil national. En mars dernier, ce dernier a accepté une initiative parlementaire qui préconise d’augmenter de 710 millions de francs par an l’enveloppe fédérale destinée à l’accueil extra-familial. Ce coup de pouce financier permettrait d’accorder un rabais de 20 pour cent aux parents des enfants placés dans une crèche jusqu’à la fin de de l’école primaire.

Un pas dans la bonne direction, à condition toutefois de redimensionner le projet en limitant sa portée au préscolaire et aux deux premières années du jardin d’enfants. Son coût pourrait ainsi être substantiellement réduit sans pour autant affaiblir ses effets incitatifs.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «l’Agéfi».