Pour une ouverture progressive des frontières

Le Coronavirus marque le retour des frontières dans le monde. Et la Suisse n’y échappe pas. Depuis le 25 mars, nos frontières, terrestres et aériennes, sont fermées. La Confédération a certes prévu des exceptions pour les ressortissants helvétiques, les résidents et les travailleurs, mais cette restriction met à mal le modèle économique suisse, qui repose sur le dépassement des frontières. Doit-on rappeler que la Suisse gagne un franc sur deux à l’étranger?

Le Conseil fédéral l’a bien compris. A partir d’aujourd’hui, et parallèlement aux ouvertures économiques, il va assouplir les restrictions d’entrée sur le territoire suisse liées au coronavirus. Ainsi les demandes présentées avant le 25 mars par les travailleurs de la zone UE/AELE et des pays tiers seront traitées en priorité. Pour les citoyens suisses et européens, le regroupement familial en Suisse sera à nouveau possible.

Une ouverture bienvenue, mais encore trop timide. Les restrictions de déplacements professionnels pour fournir des prestations de services et assurer la vente des produits doivent également être assouplies. L’avenir de notre petite économie ouverte est en jeu. De la même manière, il convient de rétablir progressivement la liberté de voyage pour les spécialistes de pays tiers et les clients venant de l’étranger, dans le respect des mesures sanitaires.

Autre problème: les contrôles filtrants aux douanes et la fermeture de nombreux postes-frontières aux quatre coins du pays. Une situation inédite depuis l’entrée en vigueur de l’accord sur la libre circulation des personnes en 2002. Autant de tracasseries douanières qui bousculent le quotidien de plusieurs dizaines de milliers de frontaliers et, par ricochet, les activités de plusieurs secteurs «essentiels» –  santé, nettoyage, commerce alimentaire – de notre économie.

Le tourisme figure parmi les grands perdants de la crise. Selon une étude de l’Institut du tourisme de la HES-SO Valais, ce secteur pourrait perdre 8,7 milliards de francs sur les seuls mois de mars à juin. Face à un tel scénario, il est crucial de rétablir la libre circulation des personnes aussi vite que le permet la situation épidémiologique, comme le demande une motion adoptée la semaine passée au Conseil national.

A l’heure où la Suisse s’apprête à entrer en récession, la tentation du repli national est forte. Une dérive à éviter à tout prix. Notre prospérité repose sur l’ouverture des marchés et son corollaire: la libre circulation des personnes. Même au temps du COVID-19, l’ouverture de notre marché du travail s’est révélée être un atout précieux. Plus de 30’000 frontaliers français travaillent dans le domaine de la santé en Suisse. En cette période de crise sanitaire, que feraient nos hôpitaux et nos cliniques sans cette main-d’œuvre?

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agéfi».