Bilan en demi-teinte de la réforme des prestations complémentaires

14 avril 2019 Revue de presse

Optimiser le système en vigueur, réduire les effets de seuils, freiner la croissance des coûts: lancée en 2015 par le Conseil fédéral, la réforme des prestations complémentaires (PC) poursuivait des objectifs ambitieux. Quatre ans plus tard, le bilan est mitigé. La révision que le Parlement vient d’accepter permettra au mieux de réduire d’un peu plus de 200 millions de francs l’accroissement des charges des PC, estimé à 2 milliards de francs sur les dix prochaines années.

Il faut le rappeler: les finances des PC vont à vau-l’eau. Entre 2000 et 2016, les coûts de cette assurance sociale, qui garantit le minimum vital aux bénéficiaires des rentes AVS et AI, ont plus que doublé, passant de 2,3 à 4,9 milliards par an. Le vieillissement démographique aidant, ses dépenses annuelles pourraient atteindre 6,9 milliards de francs en 2030.

Pour enrayer cette explosion des coûts, le Parlement a pris plusieurs mesures ponctuelles qui doivent être saluées, telles l’introduction d’un seuil de fortune (fixé à 100.000 francs pour les personnes seules et à 200.000 francs pour les couples) et la diminution des franchises sur la fortune (qui passe de 37.500 à 30.000 francs pour les personnes seules).

Mais le législatif fait fausse route dans sa volonté d’augmenter de manière excessive les loyers maximums couverts par les PC. Alors que se multiplient les nouvelles faisant état d’une tendance à la baisse des loyers et d’un taux record de logements vacants, les parlementaires décident non seulement d’augmenter jusqu’à 71 pour cent les loyers pris en compte, mais encore d’indexer automatiquement, à l’avenir, ces loyers à l’inflation.

Pour illustrer les conséquences fâcheuses de cette décision, prenons l’exemple d’une famille de quatre personnes au bénéfice des PC à La Chaux-de-Fonds. Le montant maximum pris en compte pour le loyer mensuel pourrait passer de 1250 à 1875 francs, soit 625 francs (ou 50%) de plus qu’aujourd’hui. Une mesure qui aggravera encore, au lieu de les atténuer, les incitations négatives de ces allocations. Un facteur de coût susceptible d’assombrir l’avenir de cette assurance et d’avantager nombre de bénéficiaires de PC par rapport aux retraités et à aux familles actives.

On le voit, la réforme des PC passe à côté de ses objectifs. Si l’on veut continuer d’assurer une protection sociale aux plus démunis, une refonte structurelle du système s’impose. Cela doit passer en priorité par le désenchevêtrement des tâches communes entre la Confédération et les cantons car les transferts financiers entre ces deux échelons se caractérisent par une grande opacité.

Suite à l’entrée en vigueur en 2008 de la réforme de la péréquation financière, puis en 2010 du nouveau régime de financement des soins, la Confédération paie pour des décisions qui sont prises au niveau cantonal et vice versa. Pour mettre fin à cet imbroglio financier, le système doit donc gagner en transparence et être simplifié selon le principe «Qui paie commande».

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agefi».