Assainissement de l’AI: plus de discernement, s.v.p.

26 février 2015 Opinions

Le Conseil fédéral donne le mauvais exemple. Il déclare à qui veut l’entendre que l’AI est en cours d’assainissement. Selon lui, un projet neutre en termes de coûts lui paraît suffisant pour développer cette assurance sociale, dont l’ardoise auprès de l’AVS continue pourtant d’afficher quelque 14 milliards de francs. Or, si l’AI n’est pas dans le rouge, c’est uniquement grâce au financement additionnel par la TVA jusqu’à fin 2017 et au fait que la caisse fédérale prend en charge les intérêts débiteurs.

Notons aussi, cependant, qu’après une longue hésitation, le Conseil fédéral entend traiter les exigences de la motion Schwaller dans un projet de consultation d’ici à la fin de l’année, pour la mise en œuvre des mesures incontestées de la révision 6b échouée de l’AI (frais de voyage et rente complémentaire pour rentiers avec enfants). Les employeurs devraient tout au moins être mieux soutenus dans leurs efforts de maintien en emploi des personnes présentant un handicap psychique. Et ça s’arrête là.

Il se peut que, dans l’optique du Gouvernement, l’AI suive effectivement le cap de l’assainissement. En d’autres termes, dans un monde idéal, les dettes de l’AI auprès du fonds AVS seraient amorties jusqu’en 2030. Mais sommes-nous dans un monde idéal? Non. En toute franchise, le Conseil fédéral en était tout à fait conscient au moment de fixer les lignes directrices pour le développement de l’AI. La conjoncture ralentit après l’abandon du taux plancher pour le franc suisse, ce qui aura un lourd impact sur l’AI, financée par les cotisations retenues sur les salaires. Les pronostics de croissance de la Confédération devront sans nul doute être fortement révisés à la baisse avec, comme corollaire, une sensible détérioration des projections financières pour l’AI et l’AVS. Le nouveau déficit financier qui s’ensuivra prolongera l’amortissement de la dette de l’AI jusque tard dans les années 2030.

Quand le Conseil fédéral se décidera-t-il enfin à appeler les choses par leur nom et tenir la promesse donnée au peuple lors de la votation sur le financement additionnel limité dans le temps, à savoir que l’assainissement durable de l’AI est impossible sans nouvelles mesures d’économies? Les «mesures de développement» portant sur la qualité ne suffisent pas, même si elles partent d’une bonne intention.

La situation n’est guère meilleure auprès du Parlement. La Commission des affaires sociales du Conseil national a certes affirmé il y a des mois vouloir, face aux perspectives précaires de l’AI, reprendre les mesures suspendues et non contestées de la défunte révision 6b, avec un potentiel d’économies non négligeable de 100 millions de francs par année. Mais depuis, il ne s’est rien passé et il y a fort à parier qu’il en restera ainsi dans les mois à venir, année électorale oblige.