Davantage de transparence et une meilleure lisibilité internationale des diplômes délivrés au terme d’une formation professionnelle doivent aider les employeurs suisses et étrangers à apprécier rapidement et correctement les compétences des demandeurs d’emplois. La Confédération propose maintenant de classer tous les diplômes sanctionnant une formation professionnelle dans différents niveaux et de remettre à leurs titulaires un supplément au diplôme explicatif. Cet important projet est susceptible d’apporter un plus, mais il n’est pas encore possible d’en prévoir toutes les conséquences.
La formation professionnelle suisse a fait ses preuves. Mais elle pourrait être mise sous pression: tant dans le monde anglo-saxon que dans l’espace culturel roman, des doutes s’expriment sur la compétitivité d’un système très axé la pratique et moins sur une formation purement théorique. Il importe donc de déployer de grands efforts pour mieux mettre en évidence la valeur de l’apprentissage dual et de la formation professionnelle supérieure au niveau international.
A défaut de réussir cet exercice, nous risquons de dévaloriser les diplômes privilégiant la formation professionnelle et ainsi de limiter la mobilité des travailleurs suisses qui seraient défavorisés à l’étranger. Par ailleurs, certains signaux se multiplient indiquant que les entreprises étrangères établies en Suisse ont de la peine à estimer correctement les qualifications de notre système de formation professionnelle.
La nécessité d’agir est démontrée. Notre Constitution peut attester des efforts fournis dans ce domaine. C’est elle qui contient l’exigence d’une reconnaissance par la société de l’équivalence des filières de formation professionnelle et de culture générale.
Cadre de qualifications et supplément au diplôme
La Confédération propose maintenant de créer en Suisse deux instruments qui contribuent à mieux positionner la Suisse sur le plan international et à mieux faire connaître la valeur des formations:
Le premier, un cadre national des certifications de la Suisse (CNC-CH), est une trame composée de huit niveaux. Chaque diplôme suisse de formation professionnelle est classé dans un de ces huit niveaux en fonction des exigences requises pour l’obtenir. Le deuxième instrument consiste en la remise d’un supplément au diplôme qui montre le niveau atteint dans le CNC-CH. Ce supplément contiendra aussi des informations qui permettront aux employeurs en Suisse et à l’étranger d’évaluer rapidement et de manière appropriée les compétences professionnelles des titulaires. Tant le niveau du CNC-CH que le supplément au diplôme ne sont pas liés aux personnes, mais se réfèrent au certificat délivré. Les deux instruments seront ancrés juridiquement dans une ordonnance. Celle-ci fait actuellement l’objet d’une audition qui court jusqu’à mi-mai.
Etant donné que tous les pays européens classent leurs diplômes professionnels dans une grille nationale des qualifications ou se proposent de le faire, des comparaisons entre pays deviendront possibles. Le CNC sert en quelque sorte d’aide à la traduction.
Appréciation du point de vue des employeurs
D’un point de vue patronal, l’évolution constatée dans le milieu de l’économie et de la politique de la formation appelle d’urgence une démarche. Les questions délicates ne pourront se résoudre qu’avec la pratique : les classements déboucheront-ils sur une hiérarchisation de la formation professionnelle ? En viendrons-nous, dans une sorte de course au prestige, à obtenir les meilleurs classements des diplômes ? Les réflexions concernant ces classements amèneront-elles des effets indésirables sur la définition des contenus de la formation ? Comment les partenaires sociaux se comporteront-ils avec la nouvelle transparence visée ou la hiérarchisation des diplômes lorsqu’il s’agira de négociations salariales?
Le projet sera-t-il couronné de succès? Tout dépendra de la possibilité de réussir véritablement le classement adéquat des diplômes dans le CNC-CH et ainsi de gagner l’acceptation et la confiance des employeurs. Ce que l’on peut estimer indispensable dans la perspective d’un système global cohérent n’est pas nécessairement compatible avec les intérêts spécifiques des organismes responsables des contenus des diplômes. Le classement de quelque 850 diplômes requiert donc des processus élaborés avec soin.