A Genève, l’introduction du salaire minimum ne semble pas avoir eu d’impact significatif sur le taux de chômage. Telle est la principale conclusion d’une récente étude menée conjointement par la Haute école de gestion et l’Université de Genève. Ce constat général doit toutefois être nuancé. A y regarder de plus près, la mesure fait des gagnants et des perdants.
Du côté des gagnants, on trouve les femmes. Pour ces dernières, qui sont majoritaires dans les secteurs à bas salaire, «le salaire minimum a eu pour effet d’augmenter la probabilité de transition vers l’emploi», car il constitue une incitation forte pour accepter un poste qui se présente.
A l’inverse, le salaire minimum diminue les chances des jeunes de 18 à 25 ans sans diplôme à trouver rapidement un emploi. De même, il a un impact négatif sur le taux de retour à l’emploi des chômeurs de 55 ans et plus.
La hausse du coût du travail résultant de l’introduction du salaire minimum pénalise ceux qui peinent le plus à trouver un travail
L’expérience genevoise vient ainsi confirmer que la hausse du coût du travail résultant de l’introduction du salaire minimum pénalise ceux qui peinent le plus à trouver un travail, à savoir les jeunes en quête d’un premier emploi et les travailleurs âgés confrontés au chômage de longue durée.
Elle montre aussi le salaire minimum constitue un obstacle à l’emploi des stagiaires et qu’il réduit l’attrait de la formation. A quoi bon faire des efforts pour obtenir un diplôme si les travailleurs non qualifiés ont droit au même salaire?
Focalisée sur le taux de chômage, l’étude genevoise ne rend pas pleinement compte des effets négatifs – et ils sont nombreux – de l’introduction du salaire minimum pour les entreprises. En général, la fixation d’un socle salarial d’entrée plus élevé pousse à la hausse tous les salaires des entreprises (surtout s’il prévoit une indexation automatique comme à Genève), ce qui affaiblit leur compétitivité.
Outre Genève, quatre autres cantons – Neuchâtel, Jura, Tessin et Bâle-Ville – ont introduit un salaire minimum. Or, ces réglementations cantonales, aux modalités d’application différentes, risquent de se transformer cauchemar bureaucratique pour les nombreux employeurs dont les activités dépassent le cadre local.
Comme l’a justement relevé récemment le Conseil d’Etat du canton de Soleure, qui s’oppose à une initiative cantonale pour un salaire minimum légal de 23 francs de l’heure, un tel corset réglementaire réduit la liberté économique des employeurs.
Là est le problème. Le salaire minimum met à mal notre modèle à succès d’inspiration libérale où la fixation des salaires relève de la liberté contractuelle. Elle est l’affaire de chaque entreprise ou des branches lorsqu’elles sont régies par des conventions collectives de travail.
Que ce soit à Genève ou ailleurs, les nouvelles réglementations salariales affaiblissent le partenariat social. Les accords paritaires doivent être privilégiés par rapport à n’importe quelle réglementation, car ils présentent l’avantage de coller à la réalité du terrain et de tenir compte des spécificités régionales et de branche.