Egalité salariale: un déni de démocratie inacceptable

3 février 2020 Revue de presse

Serpent de mer de la politique fédérale, l’égalité salariale entre femmes et hommes revient sur le devant de la scène. La Commission de la science, de l’éducation et de la culture du Conseil national (CSEC-N) s’est récemment penchée sur trois initiatives parlementaires demandant un durcissement de la loi sur l’égalité (LEg).

Cette base légale a été récemment modifiée dans le but précisément d’améliorer la cause féminine sur le marché du travail. La LEg révisée entrera en vigueur le 1er juillet 2020. A partir de cette date, les entreprises comptant au moins 100 collaborateurs seront obligées d’effectuer une analyse de l’égalité des salaires tous les quatre ans.

Remettre en cause une loi adoptée par les Chambres fédérales avant même son entrée en vigueur: une curieuse conception de la démocratie! Fustigeant ce mépris démocratique, la CSEC-N n’a heureusement pas donné suite aux interventions déposées par les conseillers nationaux socialistes Mathias Reynard et Min Li Marti.

Force est de relever que les propositions contenues dans les trois textes parlementaires bénéficient d’un faible soutien: l’obligation faite aux entreprises d’effectuer une analyse de l’égalité des salaires à partir d’un effectif de 50 personnes seulement, l’établissement d’une liste noire des sociétés qui ne respectent pas l’égalité salariale et la fixation d’une amende pouvant aller jusqu’à 40.000 francs en cas d’infraction, n’ont pas reçu un accueil favorable ni en procédure de consultation ni lors des débats parlementaires.

A travail égal, salaire égal: ce principe doit être appliqué, mais pas à n’importe quel prix et surtout pas en exigeant des interventions plus poussées dans la politique salariale des entreprises. Plutôt que de recourir à de telles mesures coercitives, il y a lieu d’attendre les effets de la révision de la LEg: les premières évaluations devront être réalisées au sein des entreprises d’ici fin juin 2021.

D’ores et déjà, une chose est sûre: même révisée, la LEg ne s’attaque pas au fond du problème. Les causes des inégalités salariales de genre sont connues: les femmes subissent davantage d’interruptions de carrière que les hommes, elles ont des taux d’activité plus faibles qu’eux et sont minoritaires dans les professions qui exigent une forte flexibilité géographique et temporelle. Ces entraves à la parité salariale découlent de la difficulté de concilier carrière et famille. C’est bien là que le bât blesse.

Tout doit donc être mis en œuvre pour permettre aux femmes de mieux concilier vie professionnelle et vie privée. Quelques premières mesures allant dans ce sens ont déjà été prises sur le plan fédéral.

On rappellera ici la prolongation jusqu’en 2023 de l’aide fédérale à la création de crèches. Toutefois, la réussite de l’action étatique ne saurait se passer du soutien des employeurs, notamment en favorisant un recours accru au temps de travail flexible et au télétravail.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agéfi».