L’avenir des salaires minimaux dans les communes se décidera au tribunal

26 février 2025 Revue de presse Opinions

Plusieurs villes de Suisse souhaitent s’immiscer dans le partenariat social. Ce n’est pas une bonne nouvelle.

Le résultat mérite d’être rappelé: le 3 février dernier, les citoyens de Soleure (à 58 pour cent des voix) et de Bâle-Campagne (51,4 pour cent) ont dit non au salaire minimum. L’engouement qui a conduit à instaurer le salaire minimum dans cinq cantons (Neuchâtel, Jura, Genève Bâle-Ville et le Tessin) toucherait-il à sa fin? Les votations prévues ces prochains mois dans les cantons de Vaud, Fribourg et Valais nous le diront.

Aussi étonnant que cela puisse paraître, la bataille du salaire minimum se joue également à l’échelle communale. En juin 2023, les villes de Zurich et Winterthour ont franchi le pas, une première en Suisse. A Zurich, les citoyens ont adopté un contre-projet des autorités communales qui fixe un plancher salarial à 23,90 francs par heure. A Winterthour, c’est une initiative syndicale qui fixe le salaire minimum à 23 francs par heure qui a été acceptée dans les urnes.

Un succès qui en appelle d’autres. En ville de Lucerne, l’initiative des jeunes socialistes «Un salaire décent maintenant!», qui réclame l’introduction d’un salaire minimum de 22 francs de l’heure, a été adoptée à l’été 2024. Le texte devrait entrer en force en 2026. Portées par les syndicats, des initiatives pour un salaire minimum communal ont également été déposées dans les villes de Berne, de Bienne et de Schaffhouse dans le courant de 2024. Selon les initiants, cette mesure permettrait d’éviter la pauvreté malgré le travail.

Que ce soit à Lucerne, à Winterthour ou ailleurs, ce diktat salarial affaiblirait le partenariat social

L’idée d’un salaire minimum communal semble faire son chemin, mais la justice s’y oppose, du moins à Zurich. En novembre dernier, le Tribunal administratif cantonal a accepté des recours déposés par plusieurs associations économiques contre les ordonnances d’exécution du salaire minimum en ville de Zurich et à Winterthour. Dans son jugement, le tribunal relève que la constitution cantonale n’autorise pas les communes à intervenir dans les rapports de travail de droit privé pour éviter la pauvreté. Les ordonnances sont donc annulées.

La procédure ne s’arrête pas là puisque les deux villes zurichoises ont saisi le Tribunal fédéral. L’avenir du salaire plancher à l’échelon communal va donc se décider devant la plus haute juridiction du pays. C’est à elle de clarifier si les villes et communes suisses sont autorisées à introduire une telle réglementation.

Dans l’attente de cette décision, force est de rappeler les conséquences négatives qu’aurait l’instauration d’un salaire minimum communal pour les entreprises. Que ce soit à Lucerne, à Winterthour ou ailleurs, ce diktat salarial affaiblirait le partenariat social, pénaliserait les entreprises concernées par rapport à leurs concurrentes actives dans des communes voisines et risque d’engendrer un surcroît de bureaucratie pour les nombreux employeurs dont les activités dépassent le cadre local.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agefi».