Réforme des retraites: se limiter à l’essentiel

11 novembre 2015 Revue de presse

Les institutions économiques prônent l’égalisation de l’âge à 65 ans et proposent de relever de 0,6 point la TVA.

La réforme «Prévoyance vieillesse 2020» est indéniablement l’un des dossiers phare de la législature 2015–2019 des Chambres fédérales, qui s’ouvre le 30 novembre prochain. L’avenir de nos retraites est en jeu. Accepté il y quelques semaines par le Conseil des Etats, ce grand chantier sera traité en 2016 par le Conseil national. Selon toute vraisemblance, il fera ensuite l’objet d’un vote populaire.

Dans ce contexte, le glissement à droite du nouveau Parlement est-il un gage de réussite pour cette réforme? On peut en douter à la lecture d’une récente prise de position de l’UDC, grand triomphateur des élections du 18 octobre dernier, qui considère que les grandes orientations du projet «sont juste bonnes à être mises à la corbeille à papier».

Or, faire le choix de l’opposition frontale, c’est jouer avec le feu. Le vieillissement inexorable de la population et les préoccupantes perspectives financières de l’AVS appellent d’urgence une réforme de notre système de retraites. Les échecs répétés de la 11ème révision de l’AVS sont là pour nous rappeler que seule une approche pragmatique permettra de passer à la fois la rampe du Parlement et du scrutin populaire. Les associations faîtières de l’économie (Union patronale suisse, Economiesuisse) l’ont bien compris, elles qui apportent leur soutien de principe à «Prévoyance vieillesse 2020», tout en proposant une solution alternative, financièrement équilibrée qui, focalisée sur le maintien du niveau actuel des prestations, réduit la voilure du projet mammouth concocté par le conseiller fédéral Alain Berset. Sans une réforme de fond, le déficit de l’AVS pourrait atteindre la somme astronomique de 11 milliards de francs à l’horizon 2030. Le défi est de taille, mais tout à fait réalisable sans devoir s’appuyer sur une hausse massive des recettes. Les associations économiques ont tracé la voie à suivre, à la fois économiquement supportable et susceptible de rallier une majorité: égaliser l’âge de la retraite entre hommes et femmes à 65 ans et relever de 0,6 point la TVA.

Ce savant dosage est amplement suffisant pour garantir le niveau actuel des rentes AVS jusqu’à 2030. Dit autrement, le recours à d’autres formes de financement, telle l’augmentation des cotisations salariales serait totalement superflu.

Une telle mesure aurait des conséquences négatives sur l’emploi. Du coup, les deux associations faîtières rejettent catégoriquement la proposition du Conseil des États en faveur d’une ponction de salaire supplémentaire de 0,3 pour cent, censée financer une augmentation de 70 francs de la rente AVS pour les nouveaux rentiers.

Le Conseil national est donc invité à corriger le tir. Si légiférer, comme gouverner, c’est prévoir, la Chambre du peuple doit également se soucier du financement des rentes après 2030, cette question ayant été esquivée par les sénateurs. Les associations économiques ont d’ores et déjà mis une proposition sur la table: la règle de stabilisation, qui doit être actionnée en cas de dépassement d’un certain seuil d’endettement du fonds d’AVS. Le retour à l’équilibre serait assuré par une progression échelonnée de l’âge de la retraite de 24 mois combinée à un relèvement de 0,4 pour cent de la TVA.

L’article de Marco Taddei a été publié dans «l’Agefi».