Politique européenne: l’entêtement irresponsable des syndicats

6 décembre 2022 Revue de presse Opinions

L’heure est au premier bilan. Le 23 novembre dernier, le Conseil fédéral a publié un communiqué de presse qui fait le point sur l’état d’avancement des discussions exploratoires entre la Suisse et l’Union européenne (UE). Sa lecture procure un sentiment mitigé: si des progrès ont été réalisés depuis six mois, des divergences demeurent.

Les mesures d’accompagnement à la libre circulation des personnes sont au cœur de ces échanges. Dans ce domaine également, on observe des améliorations, tout en relevant que des questions restent ouvertes. En vérité, la situation est plus sombre que ne le laisse entendre le Conseil fédéral. La perspective d’aboutir à une solution de compromis se heurte à un mur: l’intransigeance syndicale.

Dix mois après l’abandon de l’accord-cadre, à l’heure où l’érosion de la voie bilatérale touche de plein fouet plusieurs pans de l’économie suisse, la position des syndicats n’a pas bougé d’un iota: «Pas d’accord au détriment de la protection suisse des salaires.» Agité comme un chiffon rouge, le «démantèlement des mesures d’accompagnement» en cas de rapprochement avec l’UE est toujours présent dans le discours syndical.

Des craintes infondées. Force est de constater en effet que ces dernières années la législation européenne a renforcé la protection des travailleurs. L’UE a ancré le principe d’un salaire égal pour un travail égal au même endroit dans sa directive sur les travailleurs détachés. Dit autrement, les juges européens ne pourront plus faire primer la libre circulation sur la protection des salaires.

Syndicats et patronat poursuivent le même but: le maintien du niveau de protection des salaires actuels en Suisse. Pour y parvenir, une approche pragmatique et la recherche de compromis s’imposent.

L’UE doit garantir le maintien du système d’exécution dual et décentralisé pratiqué en Suisse, où les partenaires sociaux jouent les premiers rôles et sont habilités à surveiller le marché du travail. De son côté, la Suisse doit accepter des mesures plus eurocompatibles. Ainsi, il est tout à fait envisageable de remplacer le paiement d’une caution par d’autres instruments visant à garantir les créances impayées, tels des peines conventionnelles et des frais de procédures.

S’agissant du délai d’annonce préalable, une gestion administrative plus efficiente permettra à la Suisse de ramener le délai d’annonce de huit jours calendaires à quatre jours ouvrables (comme le demande l’UE). Cela n’affectera pas le niveau de protection des travailleurs.

Les discussions avec l’UE ne pourront aboutir sans avoir au préalable trouvé un compromis sur la protection des salaires. Les employeurs appellent donc les syndicats à abandonner leur posture défensive en vue de trouver une solution négocié.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agéfi».