Plans sociaux obligatoires: une «compensation» déplacée

8 septembre 2010 Nouvelles

Le Conseil fédéral entend faciliter l’assainissement des entreprises à la faveur d’une révision partielle de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite. Cette révision prévoit fort judicieusement que les rapports de travail ne seront plus transférés automatiquement à la nouvelle société lors de la reprise d’une entreprise en cas d’insolvabilité. Mais à titre de «compensation», le Conseil fédéral propose une obligation générale de mettre sur pied un plan social en dehors des procédures d’insolvabilité. L’Union patronale suisse s’oppose à cette nouveauté.

Le Gouvernement vient d’adopter un message relatif à la révision partielle de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP), destinée à faciliter l’assainissement des entreprises. Sur le fond, il convient de saluer cette révision, qui améliore les conditions permettant de sauver les entreprises concernées d’une faillite définitive ou de préserver de l’insolvabilité des parties d’entreprises dignes de protection.

Le Conseil fédéral change les règles du jeu actuel
Parmi les principales mesures visant à faciliter l’assainissement des entreprises, le Conseil fédéral entend modifier les règles en vigueur concernant le rachat d’une entreprise en situation d’insolvabilité. Dans un tel cas, l’acquéreur ne serait plus tenu désormais de reprendre l’ensemble des rapports de travail existants. Cette heureuse mesure supprime une hypothèque légale susceptible de dissuader des investisseurs potentiels de participer à l’assainissement d’une entreprise et de sauver des emplois.

Bien que cet amendement soit parfaitement souhaitable du point de vue de l’emploi, il a subi en procédure de consultation des critiques dogmatiques virulentes de la part des organisations syndicales. A titre de «compensation», le Conseil fédéral souhaite donc introduire une obligation générale de mettre sur pied un plan social en dehors des procédures d’insolvabilité. Cette obligation concernerait les entreprises de plus de 250 collaborateurs qui veulent en licencier plus de 30.

L’Union patronale suisse y est résolument opposée. En tant que telle, une compensation de nature politique qui dépasse le cadre légal (en clair: un objet de marchandage) est formellement critiquable. Elle l’est d’autant plus que la nouvelle réglementation proposée est étrangère à l’objet même du projet de révision: les procédures d’insolvabilité.

Importantes objections de fond à l’introduction d’un plan social obligatoire
Encore plus sérieuses sont les objections que l’on peut opposer sur le fond à l’introduction d’un plan social obligatoire. Les mesures concernant le personnel font l’objet de diverses conventions collectives de travail, qui définissent des procédures supplémentaires en conformité avec les dispositions légales. Dans le cadre de ces CCT, les partenaires sociaux se sont mis d’accord pour fixer des règles de négociation de plans sociaux et ont développé à ce sujet des «cultures» différentes qui tiennent compte des besoins et  particularités spécifiques à chaque branche. Cette gestion par les partenaires sociaux de la question des licenciements collectifs et des plans sociaux est la façon la plus sûre de trouver des solutions pratiques dans un domaine délicat caractérisé par des conditions qui peuvent varier beaucoup de branche en branche.

Comme le montre de nombreux exemples à l’étranger, l’obligation légale de mettre sur pied un plan social entraîne un renchérissement des mesures de restructuration socialement inutile et restreint la flexibilité du marché du travail. Le régime des plans sociaux obligatoires pousse les entrepreneurs à retarder l’embauche de personnel par crainte du coût des licenciements auxquels ils pourraient avoir à procéder un jour. Il ne faut pas davantage sous-estimer cet effet  «lock-out» des plans sociaux obligatoires qu’il ne faut négliger l’attrait qu’exerce le droit du travail libéral de la Suisse sur les entreprises internationales. Les nombreux postes de travail créés ces dernières années par ces entreprises dans notre pays montrent bien les effets positifs du système helvétique actuel sur l’emploi.