Non à la ratification de la Charte sociale européenne

18 octobre 2011 Nouvelles

Réunis à Berne, les promoteurs de la campagne «Pro charte sociale» exigent la ratification par la Suisse de la Charte sociale européenne révisée. L’Union patronale suisse est résolument opposée à cette revendication parce qu’elle entraînerait une extension injustifiée du droit social helvétique.

Lors d’une manifestation organisée à Berne pour célébrer les 50 ans de la Charte sociale européenne, les organisateurs de la campagne «Pro charte sociale» exigent la ratification de cet instrument par la  Suisse. Puisque 43 Etats membres du Conseil de l’Europe sur 47 ont reconnu cette charte, la Suisse ne saurait, déclarent-ils, s’en abstenir plus longtemps.

L’Union patronale suisse rejette très fermement cette exigence. La ratification de la Charte a été à juste titre refusée par notre Parlement en 1987 et en 2004 en raison de son incompatibilité avec le droit suisse. Or, cette situation n’a pas changé – surtout si l’on tient compte du caractère dynamique des droits stipulés dans la charte.

La Charte sociale européenne votée en 1961 et révisée en 1996 énonce des droits sociaux et traduit la volonté politique d’imposer à l’ensemble des pays du Vieux-Continent une extension de la protection sociale et des prestations sociales. Dans tous les pays concernés, on constate toutefois que ce développement touche toujours plus aux limites de l’acceptabilité économique et financière, sur laquelle ne doivent pas prévaloir des conventions internationales.

Un signal politique tout à fait contradictoire
Ces dernières années, la Suisse a porté son Etat social à un haut niveau de développement (malgré la non-ratification de la charte!). Dans l’ensemble, notre dispositif social correspond assurément à celui des Etats signataires de la charte, à quelques menues différences positives ou négatives près. Une extension supplémentaire des droits sociaux et prestations afférentes ne se justifie donc pas pour la Suisse. Face aux défis de l’évolution démographique, la priorité des priorités, en matière de politique sociale, consiste bien plutôt à garantir dans la durée le financement et l’acceptabilité économique de l’Etat social. Pour cela, il nous faut entreprendre dans le domaine des assurances sociales un certain nombre de réformes à l’égard desquelles une ratification de la charte sociale donnerait un signal politique tout à fait contradictoire.

L’Union patronale suisse estime que la Suisse ne doit ratifier des conventions internationales que si le droit suisse satisfait totalement à leurs règles. Les impulsions sociales imposées de l’extérieur à la législation suisse ne sont pas acceptables. Ce principe serait violé par une ratification de la Charte sociale européenne parce que, sur les points suivants notamment, celle-ci contredit le droit suisse: l’organe de contrôle de la Charte interprète l’article 1 (droit au travail) de la Charte dans un sens tel qu’il n’admettrait pas la limitation de l’indemnité due en cas de licenciement abusif à six mois de salaire prévue par l’article 336a de notre Code des obligations. Par ailleurs, l’article 7 de la Charte réglemente la rémunération des apprentis, intervenant ainsi dans l’autonomie contractuelle et la liberté d’organisation des partenaires sociaux.

Notre rejet de la ratification de la Charte sociale européenne n’est pas à prendre comme le refus d’une protection sociale adéquate et de bonnes prestations sociales en Suisse. Il ne fait que traduire le souci de garantir à notre pays la liberté de définir sa politique sociale de telle sorte que son financement à long terme soit assuré et que ses coûts demeurent supportables pour l’économie.