La voie bilatérale est à nouveau sur la sellette. A l’heure où les négociations sur les accords bilatéraux III sont sur le point d’aboutir, l’association Boussole/Europe lance l’initiative populaire «Contre une Suisse membre passif de l’UE». Pour éviter un tel scénario, le texte prévoit que tout accord impliquant la reprise dynamique du droit européen soit soumis au vote du peuple et des cantons.
Selon les initiants, le renforcement de la démocratie directe permettrait à la Suisse de poursuivre une politique économique indépendante. Mais le véritable objectif est ailleurs: Boussole/Europe veut empêcher la conclusion de nouveaux accords avec l’UE qui, à ses yeux, menacent les avantages de notre place économique et notre compétitivité.
Les revendications de cette petite minorité agissante ne reflètent aucunement l’avis de la majorité des entreprises suisses
Ainsi donc, une association d’essence patronale (Boussole/Europe compte parmi ses 2’500 membres une majorité d’entrepreneurs), dresse un tableau négatif des accords bilatéraux qui seraient nuisibles à l’économie nationale. Disons-le tout haut: les revendications de cette petite minorité agissante ne reflètent aucunement l’avis de la majorité des entreprises suisses.
Les arguments économiques en faveur des accords bilatéraux, maintes fois répétés, méritent d’être rappelés. La prospérité de la Suisse, qui gagne un franc sur trois par ses échanges avec l’UE, repose largement sur la voie bilatérale. Une voie royale en termes de croissance et d’emploi depuis 2002. Elle facilite non seulement un accès non-discriminatoire au marché unique, mais aussi le recrutement de personnel en provenance de l’UE, qui complète avantageusement la main-d’œuvre indigène. Un atout crucial pour faire face à la pénurie de personnel.
Depuis le 26 mai 2021, l’abandon de l’accord-cadre a plongé l’économie suisse dans l’incertitude et l’insécurité juridique. A partir de cette date, l’érosion de la voie bilatérale touche de plein fouet plusieurs pans de notre économie. Ainsi, le secteur des technologies médicales a été exclu du nouveau règlement européen sur les dispositifs médicaux. D’autres secteurs pourraient subir le même sort.
Boussole/Europe agite le chiffon rouge de la reprise dynamique du droit européen, susceptible de compromettre notre souveraineté. Or, une telle évolution réglementaire ne concernerait qu’un nombre restreint d’accords bilatéraux. S’agissant de la protection des salaires, qui est au cœur des négociations avec l’UE, l’introduction d’une «clause de non-régression» évitera à la Suisse de devoir reprendre les développements du droit européen.
La voie bilatérale est semée d’embûches: après l’UDC et les syndicats, voici Boussole/Europe qui vient jouer les trouble-fêtes. Erreur. N’en déplaise à ses adversaires, cette voie demeure la meilleure option pour les entreprises: l’adhésion à l’UE, l’EEE, la conclusion d’accords de libre-échange ou l’isolationnisme seraient nettement moins avantageux que l’adoption de nouveaux accords bilatéraux.