Négociations salariales: tenir compte des réalités économiques

1 septembre 2019 Opinions

Chaque été, c’est la même rengaine: en vue des négociations salariales de l’automne, les syndicats sortent du bois pour exiger des hausses de salaires substantielles. Cette année c’est Travail.Suisse qui annonce clairement la couleur. La centrale syndicale réclame une hausse générale des salaires de 2%, afin d’éviter une détérioration du pouvoir d’achat des travailleurs.

Une fois de plus, les syndicats font fausse route. Revendiquer une hausse uniforme des rémunérations, c’est faire fi de la grande diversité du tissu économique suisse. Le niveau des salaires se négocie de manière décentralisée en fonction d’une multitude de paramètres, dont notamment les résultats de chaque branche.

Indice PMI au plus bas

Or c’est précisément là que le bât blesse. Depuis quelques mois, le ralentissement de l’économie mondiale aidant, l’activité s’est nettement essoufflée dans de nombreux secteurs économiques. L’indice PMI, qui est un important indicateur de l’activité des entreprises manufacturières, a atteint son niveau le plus bas depuis juillet 2009.

Les chiffres à l’exportation sont, eux aussi, peu réjouissants: leur progression générale de 1,4 pour cent est due principalement à l’industrie chimique et pharmaceutique. Les entreprises des secteurs de la finance et de l’assurance escomptent certes une évolution plutôt favorable au second semestre, mais à un niveau nettement inférieur à celui de l’année précédente. En revanche, les exportations ont stagné, voire diminué dans l’horlogerie et dans l’industrie des machines. Le conflit commercial entre les Etats-Unis et la Chine, la grande inconnue du Brexit, l’issue incertaine des négociations sur l’accord-cadre entre la Suisse et l’UE sont autant d’aléas qui pèsent sur notre petite économie ouverte et qui freinent la propension des entreprises à investir et à créer des emplois.

Baisse de compétitivité

Dans un contexte où la pression à la baisse des coûts et aux gains de productivité demeure élevée, la marge de manœuvre des employeurs pour des augmentations de salaires se voit réduite. Ces impondérables devront figurer sur la table des négociations salariales pour 2020. Les syndicats appuient leurs revendications sur un besoin de rattrapage salarial. La réalité est tout autre: dans les années qui ont suivi la suppression du taux plancher du franc suisse, les entreprises n’ont guère compensé leur baisse de compétitivité en période de faiblesse économique ou de surévaluation du franc en réduisant les emplois ou les salaires. La plupart d’entre elles l’ont fait en rognant leurs marges. Cette mesure a creusé l’écart entre la progression des salaires réels et la productivité du travail.

Résultat: entre 2008 et 2018, les salaires tant nominaux que réels ont augmenté en moyenne d’un peu plus de un pour cent par année. Cette progression est remarquable si l’on songe à la croissance économique plutôt faible et au faible taux d’inflation observés dans le pays au cours de la dernière décennie.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agéfi».