Faut-il une protection contre le tabagisme actif?

3 août 2012 Opinions

Le 23 septembre, nous nous prononcerons sur l’initiative populaire dite «Protection contre le tabagisme passif». En étendant l’interdiction de fumer aux postes de travail individuels, ce texte veut protéger les fumeurs contre eux-mêmes. Il introduit de facto une extravagante protection contre le «tabagisme actif».

Actuellement, il est interdit de fumer dans des locaux fermés accessibles au public ou dans lesquels travaillent plusieurs personnes. Le tabac est toutefois autorisé dans des locaux fumeurs et dans les fumoirs avec service moyennant consentement écrit des employés d’hôtels et de restaurants concernés. Ce régime minimal s’applique depuis mai 2010. Les expériences faites jusqu’ici sont tout-à-fait positives, le changement est accepté par la population et les nouvelles règles ont manifestement apaisé le débat sur le tabagisme passif. Or, peu de temps après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, voici qu’a été déposée l’initiative «protection contre le tabagisme passif», plus schématique et surtout beaucoup plus dure, qui exige la suppression dans les six mois des locaux fumeurs autorisés et des fumoirs avec service.

Protection contre soi-même …
Plus grave, l’initiative veut «interdire de fumer dans les espaces fermés qui servent de lieu de travail». Elle vise ainsi les postes de travail individuels aujourd’hui exemptés de l’interdiction. De nos jours, l’employeur peut offrir au travailleur fumeur un local individuel si aucune fumée ne s’en échappe vers des locaux fumeurs. Cette possibilité disparaîtrait et les indépendants travaillant seuls seraient théoriquement empêchés de fumer dans leurs propres bureaux ou ateliers, même si personne d’autre qu’eux n’y entre jamais! On aurait donc une protection «contre le tabagisme actif» et la fumée serait également prohibée dans les manifestations privées desservies par des employés, ceux du service traiteur, par exemple.

Sitôt après l’introduction d’une loi fédérale sur la protection contre le tabagisme passif, le dépôt d’une initiative comportant de tels durcissements pour les personnes et les entreprises relève du harcèlement tracassier.

La réglementation actuelle suffit
Le recours aux interdictions radicales – même au nom de la santé – sert rarement l’objectif affiché. Le quotidien, le travail et les loisirs comportent des risques (sanitaires) à mettre en balance avec d’agréables opportunités (subjectives). Une gestion publique des risques n’est indiquée que là où les risques et les opportunités ne relèvent pas du choix de la même personne. Mais le culte des interdits absolus, qui vise en fin de compte à protéger les gens contre eux-mêmes, nuit aux opportunités sociales: joie des rencontres, communication, etc. Chez les humains, le goût du risque ne doit pas être sous-estimé. Les interdits favorisent les comportements transgressifs (va-t-on vers des clubs fumeurs clandestins?) sans améliorer la sécurité ou la santé en général.

Les effets de la réglementation actuelle sont visibles et raisonnables pour tous les citoyens. Les hôtels et restaurants ont la possibilité de satisfaire à la demande grâce à des locaux fumeurs avec service et les travailleurs sont protégés contre le tabagisme passif. En revanche, une protection contre la «fumée active» n’est pas souhaitable. Le radicalisme anti-fumeurs de l’initiative dite «contre le tabagisme passif» commande de la rejeter.