Combattre la pénurie de main-d’œuvre à la faveur de changements de lois

9 juin 2015 Nouvelles

Le désir d’approvisionner le marché du travail dans l’intérêt de l’économie et de la société par l’apport de main-d’œuvre qualifiée est un objectif incontesté. Pour ce faire, le Parlement mise sur des changements de lois plutôt que sur l’intérêt personnel des acteurs du marché du travail et sur de bonnes conditions-cadre. Il est toutefois peu réaliste de promouvoir la main-d’œuvre autochtone par des changements de lois et de vouloir orienter l’offre de main-d’œuvre en fonction de la demande.

Comme il fallait s’y attendre, le Conseil national a emboîté le pas au Conseil des Etats en adoptant une motion selon laquelle le Conseil fédéral entend promouvoir la main-d’œuvre autochtone en proposant des changements de lois. Cela n’a rien d’étonnant du fait qu’aussi bien la Chambre du peuple que la Chambre des cantons ont déjà accepté deux motions au contenu identique. Plus étonnant est le manque de confiance du Parlement dans le marché du travail libéral de la Suisse et le système de formation professionnelle qui a fait le succès de notre pays, l’un et l’autre étant aptes à réagir en souplesse à des déséquilibres résultant de la pénurie de main-d’œuvre.

Ainsi, contre l’avis des motionnaires, l’économie favorise spontanément, dans son propre intérêt, la main-d’œuvre autochtone. Par exemple, les entreprises dépensent chaque année environ 5,3 milliards de francs au titre des apprentissages professionnels, soutiennent les trois quarts de tous les participants à des cours de formation continue et intègrent année après année davantage de personnes atteintes dans leur santé sur le marché du travail.

Par ailleurs, du point de vue de l’Union patronale suisse, la voie sur laquelle les milieux politiques s’engagent est extrêmement problématique et peu réaliste. Cela concerne notamment l’idée que les changements de lois devraient orienter la formation professionnelle de telle manière que l’offre et la demande sur le marché du travail entraînent la moindre pénurie possible de main-d’œuvre. Non seulement la compétence de réglementation en matière de formation se situe au niveau des cantons, mais les prévisions concernant les besoins de qualifications requises pour l’avenir sont des plus incertaines dans un monde du travail dynamique.

En acceptant des motions qui vont dans le sens inverse de l’orientation qui a fait ses preuves au cœur de la politique de la formation et du marché du travail, le Parlement ignore l’intérêt propre et l’engagement des acteurs impliqués. Le Conseil fédéral demande maintenant un certain sens de la mesure dans la mise en œuvre de ces projets.