Depuis un bon quart de siècle, la politique s’exerce à la mise en œuvre de l’imposition individuelle. Jusqu’à hier, lorsque le Conseil national a approuvé de justesse, par 98 voix contre 93, le contre-projet à l’initiative des Femmes PLR pour des impôts équitables «Pour une imposition individuelle indépendante de l’état civil». On ne sait pas encore si l’alliance des partisans du PLR, du PS, des Verts et des Verts libéraux parviendra à ses fins avec ce projet.
Avec une imposition individuelle, les deuxièmes revenus seraient imposés en fonction de leur capacité économique, indépendamment de leur état civil. Actuellement, les couples mariés et les couples de même sexe vivant en partenariat enregistré sont imposés ensemble. Si les deux conjoints exercent une activité lucrative, ils doivent payer des impôts plus élevés que les couples non mariés, qui sont taxés séparément, en raison de la progressivité de l’impôt. Le fait que les conjoints qui gagnent en second – dans de nombreux cas les femmes – soient désavantagés par rapport à ceux qui gagnent le plus par un taux d’imposition marginal plus élevé, est injuste et n’est plus d’actualité.
L’introduction d’une imposition individuelle aurait pour effet d’augmenter la part du revenu du travail dont disposent les seconds revenus et d’accroître ainsi substantiellement leur incitation à travailler. Selon une étude d’Ecoplan, une imposition indépendante de l’état civil permettrait d’attirer sur le marché du travail quelque 60’000 travailleurs équivalents à plein temps supplémentaires. Un potentiel essentiel au vu de la pénurie de main-d’œuvre qui s’accentue.
La Suisse ne peut plus se permettre de se priver de milliers de travailleurs à cause d’un système fiscal archaïque – d’autant plus que l’inégalité de traitement entre les sexes est également choquante d’un point de vue sociopolitique.
Le Département fédéral des finances a calculé que l’imposition individuelle entraînerait à court terme des pertes fiscales d’un montant net d’un milliard de francs suisses par an. Dans sa réponse à la consultation, l’Union patronale suisse s’est clairement prononcée en faveur de la nécessité d’éviter au mieux les pertes de substance fiscale. L’idée de l’imposition individuelle n’est pas de réduire le substrat fiscal de la Confédération et des cantons. Il s’agit plutôt de parvenir à une imposition moderne et non discriminatoire, indépendamment de l’état civil. Il s’agit donc de répartir ce milliard de francs par an de la manière la plus équilibrée possible entre les groupes de revenus.