Prestations complémentaires et réforme: du bon et du moins bon

30 septembre 2018 Revue de presse

Basé sur trois piliers, notre régime de retraite est un modèle qui fait des envieux à l’étranger. Parmi ses nombreux avantages, le système garantit le minimum vital aux bénéficiaires d’une rente AVS ou AI ne disposant pas de ressources suffisantes pour mener une existence digne. C’est le régime des prestations complémentaires (PC). En 2016, pas moins de 318.000 personnes ont bénéficié de ces allocations, qui sont intégralement financées par la Confédération et les cantons.

Le régime des PC a largement fait ses preuves. Depuis quelques années cependant, l’allongement de l’espérance de vie aidant, ses coûts explosent. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Entre 2000 et 2016, les dépenses des PC ont plus que doublé, passant de 2,3 à 4,9 milliards de francs par an. Et si le nombre de bénéficiaires de PC devait continuer de suivre la courbe démographique, les dépenses annuelles des PC pourraient atteindre 6,9 milliards de francs en 2030.

On le voit, le régime des PC est en passe de se transformer en véritable bombe à retardement. Une réforme structurelle s’impose donc. Le Conseil fédéral l’a bien compris. Dans son rapport de novembre 2013 «Prestations complémentaires à l’AVS/AI: accroissement des coûts et besoins de réforme», il a tracé la voie à suivre: seule une refonte du régime en vigueur permettra de pérenniser l’aide aux plus démunis.

Dans la foulée, il a présenté un projet de modification de la loi sur les PC qui est actuellement discuté au Parlement. Des divergences subsistent entre les deux Chambres. A ce stade, c’est un sentiment mitigé qui prévaut. Le Parlement fait totalement fausse route dans sa volonté d’augmenter massivement le loyer maximum pouvant être pris en charge par les PC. Une explosion des coûts susceptible d’assombrir l’avenir des PC et d’avantager nombre de bénéficiaires de PC par rapport aux autres couples de retraités et à aux familles actives.

Pour illustrer notre propos, prenons comme exemple une famille de quatre personnes au bénéfice de l’AI et des PC vivant dans une petite ville comme Neuchâtel ou La Chaux-de-Fonds. A l’heure actuelle, le montant maximum pris en compte pour le loyer mensuel s’élève à 1250 francs. Or la solution extrêmement généreuse choisie par le Parlement se traduira par une hausse de cette subvention pouvant aller jusqu’à 2063 francs. Autrement dit, 813 francs (ou 65%) de plus qu’aujourd’hui!

Fort heureusement, plusieurs mesures permettant de concrétiser l’objectif de la réforme – qui est de contenir l’explosion des coûts des PC – ont été approuvées par le Conseil national. La proposition d’assujettir l’octroi de prestations complémentaires à un seuil de fortune doit être saluée. De même, la volonté de rétablir les franchises sur la fortune aux niveaux en vigueur jusqu’en 2010 doit être soutenue. Il ne reste qu’à espérer que le Conseil des Etats se ralliera aux propositions du National afin qu’à l’avenir les PC parviennent de manière plus ciblées aux personnes qui en ont réellement besoin.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «L’Agefi».