Marché du travail

Les taxes douanières agissent comme un coup de massue sur les salaires

Les organisations syndicales devraient tenir compte de la guerre commerciale dans leurs revendications.

Comme le veut une tradition bien établie, début août, Travail.Suisse a présenté ses revendications salariales pour l’année prochaine. Le syndicat réclame une augmentation de 2 pour cent pour tous les travailleurs. Mais 2025 n’est pas une année comme les autres: aux soubresauts géopolitiques viennent s’ajouter les droits de douane de 39 pour cent imposés par les Etats-Unis sur une grande partie des exportations suisses.

La donne a changé. Les exigences de Travail.Suisse apparaissent d’ores et déjà irréalistes pour les secteurs – notamment l’industrie horlogère et celle des machines – frappés de plein fouet par les surtaxes américaines. Elles sont également excessives pour nombre de branches tournées vers l’exportation et confrontées à une grande incertitude. Il est à craindre que le ralentissement conjoncturel attendu n’affecte l’ensemble des entreprises qui, du coup, seront plus réticentes à augmenter les salaires.

Et pourtant, jusqu’aux annonces du 1er août, les perspectives étaient encourageantes. Selon une enquête du Centre de recherche conjoncturel (KOF) menée en juillet dernier, les entreprises prévoyaient une augmentation de 1,3 pour cent des salaires nominaux en 2026, malgré une conjoncture économique modeste. Compte tenu du recul de l’inflation, qui devrait se modérer à 0,5 pour cent l’année prochaine, cela aurait permis une hausse significative des salaires réels en 2026

Dans ce nouveau contexte, des augmentations généralisées des salaires nominaux ne devraient pas dépasser 1 pour cent

Le coup de massue des droits de douane a donc mis des bâtons dans les roues des entreprises. Aujourd’hui, dans de nombreux secteurs, l’objectif n’est plus d’augmenter les salaires, mais d’assurer la survie des entreprises et de préserver ainsi le plus d’emplois possible.

Dans ce nouveau contexte, des augmentations généralisées des salaires nominaux ne devraient pas dépasser 1 pour cent. Les marges nécessaires pour les financer fondent comme neige au soleil. Des hausses trop importantes sont de nature à fragiliser nombre d’entreprises et accentuer encore la pression pour délocaliser la production vers les Etats-Unis ou à l’étranger.

Une lueur d’espoir subsiste toutefois: compte tenu du faible taux d’inflation, qui devrait se stabiliser à 0,5 pour cent en 2026, il y a de bonnes chances que les salaires réels – et donc le pouvoir d’achat – augmentent dans les secteurs qui ne sont pas directement touchés par les droits de douane.

Une heureuse perspective pour de nombreux salariés qui s’inscrit dans la durée. Après une période de recul entre 2021 et 2023, principalement en raison de l’inflation, les rémunérations réelles ont augmenté en 2024 et devraient continuer sur cette lancée en 2025 et 2026. La preuve que, malgré un environnement incertain, les employeurs continuent d’associer leurs collaborateurs aux résultats des entreprises.

Le commentaire de Marco Taddei est paru dans «l’Agéfi».