AVSplus: tous perdants!

2 septembre 2016 Revue de presse

La majoration de 10% de toutes les rentes AVS réclamée par l’initiative sur laquelle les Suisses votent le 25 septembre n’améliorera pas la situation des rentiers modestes, accuse Marco Taddei, membre de la direction de l’Union patronale suisse, qui appelle à voter non.

Attention, titre trompeur: l’initiative «AVSplus: pour une AVS forte», portée par l’Union syndicale suisse (USS) et soumise à votation le 25 septembre prochain, est un leurre. La majoration linéaire de 10% de toutes les rentes AVS réclamée par les initiants aurait pour conséquence d’affaiblir le premier pilier de notre Etat social. Un pilier bien chancelant depuis quelque temps.

Touchée de plein fouet par l’évolution démographique et le déséquilibre croissant entre actifs et retraités, l’AVS affiche depuis 2014 des chiffres rouges. L’an passé ses comptes présentaient un résultat négatif de 579 millions de francs.

Un trou supplémentaire dans les caisses
Et l’avenir s’annonce encore plus sombre: si rien n’est fait, les oracles de l’Office fédéral des assurances sociales prédisent un déficit avoisinant les 8 milliards de francs à l’horizon 2030. Avec ses dépenses additionnelles de 4,1 milliards de francs par an, l’initiative AVSplus creuserait un trou supplémentaire dans les caisses de l’assurance.

La générosité syndicale a donc un coût. Mais qui paiera la facture? Tout en restant évasifs sur la question, les initiants envisagent un relèvement des cotisations salariales des employeurs et des salariés. Une fois de plus, les entreprises devront passer à la caisse pour financer les lubies syndicales.

Aucune amélioration pour les rentiers modestes
Déjà confrontées aux incertitudes du 9 février et aux aléas liés au franc fort, nombre d’entre elles ne peuvent supporter des charges supplémentaires, qui risquent de mettre en péril de nombreux emplois. Détail piquant, l’USS propose également un relèvement de la TVA, un impôt généralement considéré comme antisocial par les syndicats, car pesant proportionnellement davantage sur les bas revenus que sur les revenus élevés.

Autre effet pervers: les initiants préconisent une augmentation généralisée et uniforme des rentes, mais n’apportent aucune amélioration pour la grande majorité des rentiers modestes, censés être les principaux bénéficiaires de l’initiative. En effet, pour cette catégorie de rentiers, le supplément sur la rente AVS sera neutralisé par la baisse des prestations complémentaires (PC). Certains d’entre eux perdraient même les avantages liés aux PC, tel que le remboursement des frais de maladie et d’invalidité. Au final, seuls les retraités aisés bénéficieraient pleinement d’AVSplus.

La voie à suivre a été tracée par le conseiller fédéral Alain Berset
L’AVS n’est pas un libre-service. Dans le contexte actuel, une hausse massive des rentes AVS serait totalement irresponsable. Avis partagé par les experts de la Commission fédérale AVS/AI, où siègent pourtant des représentants syndicaux. Cette commission a récemment recommandé au Conseil fédéral de maintenir les rentes de l’AVS au niveau actuel en 2017. Ce dernier a sagement suivi la proposition.

Plutôt que d’augmenter les rentes, les syndicats seraient bien inspirés de collaborer à une réforme visant à consolider l’AVS. La voie à suivre a été tracée par le Conseiller fédéral Alain Berset: son projet de réforme «Prévoyance vieillesse 2020», actuellement traitée aux Chambres fédérales, vise précisément à maintenir le niveau des rentes et à assurer le financement du premier et deuxième pilier. Or l’éventuelle adoption d’AVSplus risque d’enterrer l’ambitieuse réforme du ministre socialiste. Après les rejets répétés de la 11e révision de l’AVS, l’échec n’est plus permis.

Fragiliser le financement de notre système de prévoyance, alourdir les charges des entreprises et les actifs, prétériter les consommateurs, sans pour autant améliorer la situation des retraités dans le besoin, tel est l’avenir radieux que nous promet AVSplus. Cette politique de Gribouille doit être rejetée sans réserve le 25 septembre prochain.

L’article de Marco Taddei a été publié dans «le temps».